Chapitre 3 :

Le début des ennuis

-marche lentement et aie l’air de souffrir un peu plus ! Sinon on sera pas crédible Jin’ !

-j’fais s’que j’peux ! Cette peau de bête est plutôt lourde et j’ai mal au dos ! répondit celui-ci étouffé sous la peau de mouton

-parfait ! T’es déjà dans ton rôle de grand père amoché! haha

-heureusement que ce truc me recouvre complètement, s’ils voyaient mon visage le plan tomberait à l’eau !

-parce que tu crois que j’suis plus discret avec mes cheveux tricolores en pic ?

-tu peux toujours dire que t’es blond et que le sang des blessures que tu as subies les a teinté de cette couleur … après tout on n’est pas indemne

-mué… bon, plus un mot on entre dans le village !

Oron guidait Jin à travers le début de champs servant d’entré au village de Dubois, il n’y avait pas énormément de villageois à cette heure, ce qui laissait tout de même une dizaine de boutique ouverte avec une file d’attente devant la boulangerie et autour de la fontaine centrale. La verdure de la forêt avait disparu, il ne restait maintenant que quelques arbres sur une placette déserte sur laquelle s’était établi un marchand d’arme et quelques habitations ; plus haut sur les collines vivait aussi des familles plus ou moins pauvre en cette période de l’année, et tout au fond de cette partie civilisée un gigantesque champs de blé en parti brûlé par le soleil ou réduit à de la simple paille à cause du givre précédent et des insectes. Quelques pâtures laissait voir paître une dizaine de bovins, tous aussi maigres les uns que les autres, pas de quoi nourrir la totalité du village en lait et en viande du moins…

Comme les gens commençaient à repartir chez eux parce que la nourriture n’était pas suffisante pour tous, Oron se mit à essayer d’accélérer le pas, Jin trébucha plusieurs fois sur quelques touffes d’herbes et se cogna le dos au bras d’Oron qui le tenait, ce qui rouvrit ses blessures dorsales et lui arracha un cri de douleur qu’il n’aurait pas su imiter si il avait réellement joué la comédie.

-à l’aide ! Aidez nous !! Les monstres nous ont surpris dans la forêt la nuit dernière ! J’ai fuis comme j’ai pu en abandonnant mes marchandises sur place mais grand père n’a pas pu courir aussi vite que moi et ils lui ont griffé le dos ! Par pitié ! Je n’ai même plus de quoi nous soigner et nous n’avons pas mangé depuis 3 jours !

Jin laissa échapper une toux roque en s’agrippant plus fort à Oron : si la douleur ne le faisait pas souffrir réellement il rirait sans retenue de cette situation absurde. Apparemment Oron avait fait de l’effet sur les gens les plus proches qui commençaient à se rapprocher pour constater l’ampleur des dégâts, tous avait l’air de voir des cadavres ambulant ; le sang séché sur leur corps ne pouvait pas contredire leurs propos. Une vieille habitant dans la maison sur la colline la plus proche de l’entrée du village accourut. Oron continuait de crier à l’aide et de demander des vivres et des soins aux villageois, pourtant personne n’avait l’air de réagir ; personne n’avait la moindre nourriture sur lui, personne ne semblait non plus se soucier du fait que « le vieux » ou Oron ne meurt. La vieille se rapprocha lentement et quand elle fut à une distance suffisante pour pouvoir les toucher elle parla enfin.

-et bien mon enfant ! Tu dis que des monstres t’ont attaqué dans la forêt avec ton grand père et que tu es marchand ? D’où viens-tu ? Demanda-t-elle d’un air suspicieux

-allons grand-mère ! Tu vois bien qu’ils sont mal en point ! Laisse-les se reposer quelque part pour la nuit ! Plaida l’aubergiste

-nous venons de derrière les montagnes du nord ! Une ville nommé Mirös, étant elle-même en conflit avec son jumelé ïos, récita Oron.

Après tout, c’était la stricte vérité, mis à part le fait que ces villes n’étaient pas derrière les montagnes du nord du pays mais quelque part ailleurs au milieu de l’océan. Oron fixa la grand-mère du regard de braise qu’il réserve habituellement à Jin pour l’obliger à changer d’avis ou l’endormir sans prévenir. Pourtant son don n’avait aucun effet sur la vieille qui prit un air encore plus imposant et méprisant.

-vous n’êtes pas les bienvenus ici, nous n’avons pas besoin de plus de bouches à nourrir en ce temps de famine ! Si le vieux meurt c’est qu’il n’était pas assez accroché à sa vie, et te nourrir toi, jeune homme, ce serait laisser des cailloux à manger à nos enfants ! De plus, il me semble t’avoir déjà vu dans la forêt en compagnie d’un être infâme que tu protèges ! Comment peux-tu espérer gagner notre confiance ?

Tout à coup plus personne n’osa contredire la vieille et tous semblait être du même avis qu’elle, sauf l’aubergiste qui ne voyait là qu’une manœuvre pour ne pas gagner plus d’argent. Oron n’osait répondre, au moindre faut pas tout le plan tomberait à l’eau, peut être essayait-elle de le déstabiliser ? Non, elle était au courant pour Jin… personne n’était au courant de son existence, et en 60 ans le nombre de personne l’ayant connu quand il avait 8 ans avait largement diminué.

Jin essaya de remonter petit à petit la peau de mouton sur sa tête en espérant qu’aucune de ses mèches vertes ne ressortent pendant la manœuvre. Il était perturbé aussi par « l’être infâme » que la vieille avait utilisé pour le désigner, lui, il en était certain. Soudain un vent froid le fit frissonner, et le temps qu’il ne rouvre les yeux il comprit que la peau de bête avait été retirée de ses épaules et que son visage était maintenant à découvert.

Tous le regardait d’un air mauvais, mélange d’effroi et de colère, Oron se plaça entre Jin et ceux qui semblaient menaçants pour servir de bouclier. La grand-mère continua.

- détrompez-vous tous ! Il n’y a ici qu’un sale traître de demi-sang adorateur de démons et un monstre assoiffé de sang qui ne cherchent qu’à vous tromper pour obtenir des faveurs !

-non !! On est comme vous ! On cherche juste à vivre ! Se défendit Jin piqué à vif

-un monstre ne vit pas, il tue !

-je… ne… suis …pas… un monstre...! articula nettement Jin en essayant de garder son sang froid. Maintenant il tremblait et était submergé par le chagrin et la colère. Il se souvenu de sa 1^ère rencontre avec un humain, 10 ans plus tôt, et serra les poings : la tristesse et son regret d’exister le reprenait, ne sachant si il devait continuer d’adorer sa parti humaine ou au contraire si il devait la maudire de lui avoir donné naissance.

Il voulait disparaître, être effacé de ce monde qui ne lui convenait pas et qui ne l’accepterait pas, de toute évidence.

Il se mit à courir en direction du bois de Cèdre, Oron à ses trousses, mais il ne s’arrêta pas pour l’attendre. Ses pas le guidaient pendant que son cerveau restait embrumé par ses idées et ses doutes. Quand il se ressaisit enfin et qu’il comprit qu’il s’était arrêté il contempla l’arbre gigantesque qui s’offrait à sa vue.

Son feuillage épais ne laissant pas passer la lumière, son écorce noueuse et ses racines robustes et apparentes qui avait craquelé le sol, ses fruits informes rappelant le chèvrefeuille et même l’atmosphère qui se dégageait de ce lieu mystique lui donnaient l’impression d’être accueilli chaleureusement par celui qu’il voyait comme l’exemple de toute espèce vivante : Yggddrasill.

Oron arriva peu de temps après cette contemplation, mais Jin était déjà hypnotisé par le Gösian et ne cessait de murmurer d’anciennes prières.

-Jin ...? Oron s’approcha lentement en poussant les quelques branches qui le séparaient de lui pour arriver près du Gösian. Il s’étonna de ne pas avoir la force d’avancer davantage ; quelque chose le retenait. Il se débâtit rageusement craignant que Jin ne soit blessé par une entité maléfique, mais Jin ne répondait pas, ses yeux ne pouvaient quitter le Gösian un instant, et pourtant il ne donnait pas l’impression que c’était l’arbre qu’il regardait. Une lumière se mit à entourer l’arbre et Jin, Oron comprit qu’il était sur le point de le perdre complètement et se déchaina violemment contre cette force magique, sans succès.

« … les siècles passèrent et personne n'apparu, ils furent retrouvé et trahis par les nains, les humains se mirent à traquer les dragons sans relâche pour leur faire payer le massacre dont ils avaient été les acteurs majeurs pendant cette guerre. La "guerre des chimères" avait commencé, et dura plus de 100 ans. Des espèces disparurent, d'autres furent en surnombre...les espèces se mélangèrent et donnèrent naissance à de nouveaux individu, incapable de pouvoir être aimé d'un camp ou de l'autre tel que les demi-elfes, les demi-démons, et les "monstres" ceux qui ne peuvent être classés...  si seulement j’avais pu les retenir…alors peut être…de mes propres mains… »

Jin étendit ses bras vers le Gösian comme pour recevoir quelqu’un, ou lui donner quelque chose. Oron, à bout de force s’appuyait sur la barrière magique en tendant le bras vers Jin pour le retenir, Jin ne le remarqua même pas, son hypnose était totale et il ne cessait de répéter ses derniers mots.

Dans l’esprit de Jin il ne se rendait pas compte qu’il était hypnotisé, il voyait le Gösian fleuri, un grand champ de blé, ou peut être une prairie, la forêt n’était pas autant étendue que maintenant, l’air était frais et doux. Un air apaisant, qui n’existe quand période de paix, ou en présence d’Yggddrasill.

-ce monde ne te tente pas ?

Jin se retourna. Ce qu’il vit en premier étaient de long cheveux blond ondulés, la lumière éblouissante qui s’y reflétait et des ailes en branches couvertes en partie de feuilles, de fleurs et des mêmes fruits que le Gösian. Il était grand, fin de visage, à peine musclé, longiligne, son regard aspirait la douceur, la sérénité et un calme si prenant que la déprime de Jin disparut d’un coup. Il se rapprocha sans méfiance de cet être inconnu et remarqua alors ses oreilles en feuilles tombantes et ses antennes mélangées à ses cheveux. Au plus profond de son être il connaissait cette personne, il en était persuadé, ce qui l’empêchait de lui demander qui il était.

Croyant que Jin n’avait pas comprit ce qu’il disait, il continua de lui parler de sa voix douce, ni trop grave ni trop aigüe, peut être un peu lente, quelque chose d’agréable.

- ton monde était ainsi avant qu’ils ne détruisent tout. Si seulement j’avais pu les retenir…alors peut être…de mes propres mains…j’aurais pu empêcher tous ces massacres entre elfes et humains… si j’avais été capable de survivre j’aurais pu protéger ce monde qui m’est si cher. Élus, c’est maintenant votre devoir, n’y manquez pas, ce monde à trop besoin de vous, il vous supplie de mettre fin à ses souffrances, et alors… ce jour là un nouvel espoir renaitra pour les demi-sang.

Jin l’écoutait attentivement, tout en observant ses yeux d’un bleu clair surprenant. Il ne pouvait s’empêcher de l’admirer, leur lien était trop fort pour n’être qu’un hasard, il avait l’impression de voir ses propres souffrance hanter cet homme, il y voyait aussi un père avenant qu’il n’avait jamais connu, un frère trop attentif et protecteur comme Oron et mystérieux dans sa façon d’annoncer l’avenir d’un ton assuré comme si il le lisait.

-qui êtes vous ? demanda t-il enfin

-il me semble que nous nous connaissons Jinon, ou plutôt devrais-je t’appeler comme le voulait ton père… « Lu Jian », je suis la source de tous tes problèmes et j’en suis moi-même désolé.

-Jinon ? Lu Jian ?la source… Yggddrasill ?? S’étonna Jin qui ne comprenait soudain plus rien. Cette incompréhension fit rire Yggddrasill, et tout ce qui l’entourait fut secoué par un vent calme. La lumière commençait à faiblir dans les environs et Yggddrasill regarda au loin le ciel. Malgré son esprit embrumé par tout ce qu’il vivait, Jin commençait à reprendre ses esprits et s’aperçut que l’angoisse le reprenait. Il avait l’impression de connaître Yggddrasill avec autant d’évidence, qu’il doutait soudain de se connaître lui-même. Qui était-il au final ? Si on mettait de côté ses gênes multiples dû à sa transformation, ce n’était qu’un sale gamin qui avait, pour le coup, une hallucination incroyablement réaliste pour croire qu’il connaissait Yggddrasill comme il se connaissait lui-même.

- de mes propres mains… ? Je suis…toi ?chuchota t-il pour lui-même

Yggddrasill disparu en éclat et le paysage s’assombrit jusqu’à s’évaporer dans une brume fine. Jin cherchait désespérément à rassembler tous les morceaux qu’il voyait voler en éclat devant lui quand une autre vision remplaça ce paradis perdu: il était en train d’être absorbé par les branches du Gösian, prisonnier de l’arbre il ne pouvait plus bouger et ses forces le quittaient. Un ours fonça sur lui et l’arracha à cette 2^ème hallucination et cette fois-ci Jin se réveilla pour de bon. Oron le serrait fortement et le secouait désespérément en l’appelant.

-Jin !! Réveil toi !! Ne me laisse pas...ne nous laisse pas seul !!

Il tremblait maintenant face à cette probabilité.

-ça…va...kof kof, réussi à lui répondre Jin entre deux secousses et étreintes. Pourquoi… keuh… Yggddra… mais Jin ne réussi pas à continuer sa phrase, persuadé qu’une voix venait de lui ordonner de ne pas en dire plus. En cet instant il n’était pas seulement lui, il était l’élu principal d’Yggddrasill, sa moitié et sa continuité, celui qui pourra faire la différence dans un monde nouveau ou qui mènerait celui-ci à sa perte s’il échouait.

« Celui qui devra rester pur… »

will be continue in 4th chap'...