Chapitre 6 :

Le chamane

Hûyn se réveilla en sursaut, le regard terrifié par le cauchemar encore présent dans son esprit, il suait à grosses gouttes. La fenêtre de sa chambre restée ouverte laissait passer un léger filet d’air à travers le pare-soleil en plaque de bambou. Il s’agrippa à son drap et réalisa enfin qu’il n’avait rien à craindre.

Encore une nuit où ses rêves s’attaquaient à sa vie, où il était pris de vertige infini, avait l’impression de tomber dans un puits sans fond où l’unique sortie était la mort, puis le réveil. Les voix le pourchassant tournoyaient dans sa tête, inlassablement, incompréhensibles, elles ne cessaient de le suivre jusqu’à sa mort.

            Il se leva enfin, s’habilla et regarda son visage dans le miroir de sa chambre : cela faisait maintenant 5 ans que ses nuits étaient ponctuée de cauchemar. 5 ans depuis que son frère était parti de la maison sans qu’il ne puisse se pardonner de ne lui avoir rien dit. Son visage était fatigué, ses yeux auparavant joyeux et insouciants étaient devenus tristes, inexplicablement meurtris par la haine. Lorsqu’il ne dormait pas il entendait des voix, et ses sautes d’humeur avaient de temps à autre des influences sur ce qui l’entourait. Il prit son sac et descendit dans le salon. Ses parents étaient là, affairés à leurs habituelles tâches quotidiennes. Ils ne lui prêtèrent aucune attention, trop concentré par leurs occupations. Son petit déjeuné était prêt sur la table, mais il parti sans le prendre.

« J’y vais, à ce soir » c’étaient les uniques mots qu’il prononçait dans la journée, sans qu’il n’y ait de réponse.

            Il marchait, repensait toujours à Jin. Il ne pouvait pas l’oublier. Il passait son temps à le rechercher, géographiquement, spirituellement, le voyait en rêve souffrir et vivre dans un monde étrange, différent du sien.

« Seul tu n’arriveras à rien

-ce n’est pas à toi que revient cette mission

-tout ce que tu as fais c’est le faire souffrir !

-le droit d’aller là bas n’est pas donné à tous

-les cauchemars sont tellement violents qu’il ne pourra rien faire seul »

Il s’arrêta un moment et s’assit à l’ombre, en attendant que les voix se dissipent. Il recommençait à se sentir mal et reposa sa tête sur sa main. Ses sueurs froides le reprenaient. Ses voix venues d’outre tombe lui dictant ce qu’il avait fait et devait faire le terrifiaient. Le temps de reprendre ses esprits, une jeune fille s’était rapprochée de lui en lui tendant une casquette, un large sourire aux lèvres. Il tourna la tête, la regarda d’un mauvais œil et se releva.

-je n’ai pas besoin de ça, dit-il d’un ton haineux

-ho, mais tu semblais pourtant aller mal, le soleil tape fort aujourd’hui, tu ferais bien de faire attention ! répliqua t elle en mettant elle-même un chapeau différent de celui qu’elle avait à la main.

C’était à croire qu’elle l’avait pris exprès pour lui, qu’elle savait qu’il sortirait sans rien.

Hûyn ronchonna et marcha d’un pas plus rapide en regardant ses pieds. Elle le rattrapa et lui tendit un petit paquet.

-je t’ai dis que je n’en voulais pas ! S’énerva-t-il sans même regarder ce qu’elle lui tendait

-mais… tu

-Tila ça suffit maintenant, laisse moi seul, je n’ai pas besoin de problèmes supplémentaires !

Elle s’arrêta de marcher, le regarda d’un air étonné et vexé. Elle se mordilla la lèvre et courut pour se placer juste devant lui.

« Mais qu’est ce que… ». Il s’arrêta et la regarda dans les yeux d’un air méprisant. Elle était énervée.

- la moindre des choses lorsque l’on t’offre quelque chose c’est de l’accepter, sale mufle ! je me fais du soucis pour toi ! ça fait des mois que tu ne viens plus en cours !

-normal, j’ai été viré. Le prof n’a pas accepté d’admettre son erreur sur Jin lorsque je lui ai fais remarquer. Répondit Hûyn d’un air blasé

-tu aurais quand même pu faire un effort ! Personne n’a connu ce Jin à part toi !

Hûyn se sentit piqué à vif et la regarda de haut. Elle n’était pas si petite, des cheveux court châtains et des yeux noisettes.

« elle ose supposer que je suis fou ? » pensa-t-il.

-je suis sûre que ça te sera utile, alors accepte le. Ordonna t’elle

Huyn soupira et lui arracha des mains, ne prit pas la peine de prendre soin du papier en le retirant et découvrit un pendentif en forme d’anneau avec un sablier en son centre, lui-même au centre d’un œil. De part et d’autre de l’extérieur de l’anneau pendaient des plumes et des perles nacrées.

« qu’est ce que c’est que ce truc ? » pensa Hûyn

- c’est un porte bonheur, ma grand-mère me l’avait donné pour que je reste en contact avec ceux que j’aimais, il m’a bien aidé, mais il te servira plus qu’à moi maintenant…, dit elle en baissant la tête

Hûyn tourna la tête vers elle, étonné. Il comprenait maintenant son sentiment de solitude et son besoin extrême d’aller vers l’autre : tout comme lui, ses liens familiaux étaient complexes, mais lui préférait se renfermer sur lui-même que d’aller chercher du réconfort auprès des autres.

-tu veux dire que…

-il ne me reste que ma sœur, nous vivons sous le même toit. Ce collier me permettait de communiquer avec mes parents, mais depuis quelque temps je n’ai plus de réponse.

La fin de sa phrase s’étouffa dans un sanglot incontrôlable. Hûyn la prit dans ses bras pour la calmer, fermant les yeux, patiemment. Il avait trouvé un être qu’il pourrait protéger et étant à sa porté. Lorsqu’il rouvrit les yeux, il remarqua une lueur bleue les entourant, il se concentra dessus.

« il a choisi son sacrifice

-il va enfin accéder à ses pouvoirs

-elle doit mourir

-la délivrance, la délivrance nous sera bientôt apportée !

-sacrifice ! Apporte-nous un sacrifice ! »

Hûyn la relâcha en reculant, tout en se maintenant la tête. Il refusait de sacrifier Tila pour accéder à ses pouvoirs. Sa vision se troublait, il avait l’impression d’entendre un bruit de scie circulaire, un acouphène l’empêchait d’entendre correctement ce que lui disait Tila à côté de lui. Il s’assit et ferma les yeux en serrant les dents, s’écrasant la tête avec ses mains avec le plus que force qu’il pouvait. La douleur devait disparaitre, peu importe l’issue. Des flashes lumineux se succédèrent dans son esprits, jusqu’à le transporter vers une plaine immense dominée par une ville fortifiée en bordure de côte. L’instant suivant il vit une salle majestueuse gardée par une rangée de soldat et généraux. Bien au centre et tout au bout, un homme âgé observant d’un œil mauvais un soldat en particulier. Le dernier flash se fixa de plus en plus prêt sur le soldat vu par le vieil homme : le haut de son visage était caché par un bandeau, ses cheveux étaient verts et il avait 4 oreilles. C’était Jin.

Les flashes s’interrompirent et Hûyn se réveilla en sursaut, le regard terrifié par le cauchemar encore présent dans son esprit, il suait à grosse goute. La fenêtre de sa chambre restée ouverte laissait passer un léger filet d’air à travers le pare-soleil en plaque de bambou. Il n’y avait aucune trace de Tila autour de lui, les voix avaient cessée pour le moment.

-rien qu’un rêve, ce n’était qu’une illusion…

Il s’agrippa à son drap. Dans sa main, la chaîne du collier qu’elle lui avait offert en rêve émit un cliquetis mystique.

will be continue in 7th's chap'...